Trop d’erreurs, trop de fraudes : face aux critiques récurrentes sur la fiabilité du diagnostic de performance énergétique, le gouvernement passe à l’action. Deux arrêtés publiés le 18 juin 2025 viennent renforcer considérablement le cadre réglementaire du DPE, avec des changements majeurs à la clé pour les particuliers comme pour les professionnels de l’immobilier.
Un outil indispensable mais souvent contesté
Le DPE, obligatoire lors de la vente ou de la location d’un bien, est devenu un pilier de la politique énergétique du logement. Il attribue une note de A à G en fonction de la performance énergétique du logement (isolation, chauffage, consommation, émissions de CO₂…). Mais depuis sa généralisation, le DPE a été largement remis en question : résultats incohérents, diagnostics à la chaîne, manipulations volontaires…Selon la Cour des comptes, ces dérives nuisent à la crédibilité de l’outil et compromettent la transition énergétique. Il fallait donc une réforme en profondeur, réclamée de longue date par les acteurs du secteur.
Premier arrêté : Renforcement des outils de vérification et de traçabilité
Le premier arrêté vise à sécuriser le processus de réalisation et de transmission du DPE. Il introduit plusieurs nouvelles obligations techniques pour les diagnostiqueurs et les éditeurs de logiciels.
Parmi les mesures phares :
- À partir du 1er juillet 2025, tout diagnostiqueur devra présenter un QR code prouvant la validité de sa certification directement au client lors de la visite sur site.
- Dès le 1er septembre 2025, un QR code Ademe sera présent en première page de chaque DPE. Il renverra directement vers la fiche en ligne du bien, hébergée par l’Ademe, l’agence de la transition écologique.
- À compter du 1er octobre 2025, les logiciels de DPE ne pourront plus afficher les étiquettes énergétiques (A-G), ni les valeurs de consommation et d’émission de gaz à effet de serre, tant que le DPE n’a pas été validé et enregistré dans la base de données de l’Ademe.
👉 Objectif : empêcher toute manipulation ou modification du DPE après coup, et garantir que les résultats communiqués aux acheteurs ou locataires soient certifiés et traçables.
Deuxième arrêté : Renforcement des compétences et des contrôles
Le second arrêté vient encadrer davantage la profession de diagnostiqueur immobilier. Il fixe de nouvelles exigences en matière de formation, de certification et de contrôle.
Les principales nouveautés :
- Mise en place d’une analyse statistique automatisée des DPE réalisés, pour détecter les cas suspects (trop de diagnostics par jour, incohérences de localisation, etc.).
- Contrôles renforcés des organismes de certification et de formation, avec un audit tous les 10 mois imposé par le Cofrac, garant de la qualité des certifications.
- Création d’une liste noire des diagnostiqueurs en infraction, avec une suspension de 18 mois, voire 24 mois en cas de récidive (contre 6 mois auparavant).
Renforcement des examens de certification, avec des sujets générés aléatoirement et des contrôles accrus pour éviter les fraudes lors des formations.
Un nouveau souffle pour la fiabilité du DPE
Avec ces deux arrêtés, le gouvernement entend restaurer la confiance dans un outil central de la politique logement. Pour Valérie Létard, ministre chargée du Logement :
« Ces textes constituent une étape essentielle pour fiabiliser le DPE et orienter efficacement les travaux de rénovation énergétique. »
Ce renforcement s’inscrit dans un plan d’action global, initié en mars 2025, visant à rendre le DPE plus rigoureux, plus lisible et plus difficile à falsifier.
Ce que cela change pour les particuliers et les professionnels
Pour les particuliers :
- Le DPE devient plus fiable et plus facile à vérifier grâce aux QR codes Ademe.
- Il ne pourra plus être communiqué avant validation officielle, réduisant ainsi les manipulations ou pressions sur le diagnostiqueur.
- Lors de l’achat ou de la location d’un bien, il sera plus facile de vérifier la conformité et l’origine du DPE grâce à la base publique en ligne.
Pour les professionnels :
- Les diagnostiqueurs devront se mettre rapidement en conformité avec les nouvelles obligations (QR code, logiciel, certification…).
- Les agences immobilières et notaires devront s’assurer de la validité des diagnostics transmis.
Le secteur devra montrer patte blanche, sous peine de sanctions sévères et d’un renforcement des contrôles sur les fraudes.
Une réforme nécessaire, mais pas sans contraintes
Ces mesures sont largement saluées par la profession, bien qu’elles impliquent des ajustements logistiques et financiers. Certaines petites structures de diagnostic redoutent des charges supplémentaires liées à la certification et aux nouvelles exigences.Mais pour l’État, c’est une étape indispensable : le DPE sert de base aux politiques publiques, notamment à l’interdiction progressive des logements classés F et G à la location. Il est donc primordial qu’il soit fiable et infalsifiable.
📊 DPE : Les chiffres clés en 2025
- Plus de 800 000 DPE réalisés entre janvier et mai 2025 ;
- Environ 12 % suspectés d’anomalies ou de résultats incohérents ;
- 50 millions d’euros de fraudes potentielles détectées selon Tracfin ;
- Objectif : réduire de moitié les fraudes d’ici fin 2026, selon le ministère.
Conclusion : Vers un DPE plus fiable, plus transparent, plus crédible
Avec ces deux nouveaux arrêtés, le gouvernement franchit un cap décisif dans la fiabilisation du DPE. C’est une bonne nouvelle pour la transition énergétique, mais aussi pour tous les acteurs du marché immobilier. Le DPE devient enfin l’outil de confiance qu’il aurait toujours dû être, au service de la rénovation énergétique et de la transparence des transactions
Publié le 25 juin 2025